Le 6 novembre 2004, la situation atteint un point critique lorsque deux avions de chasse ivoiriens (des Sukhoi-25) attaquent un camp de l’armée française situé à Bouaké. L’assaut coûte la vie à 9 soldats français et à un civil américain. La France réagit immédiatement en détruisant les deux avions ivoiriens ainsi que toute la flotte aérienne des Forces armées ivoiriennes, dans le but, selon le président français Jacques Chirac, de “les priver de capacité offensive”. Ce jour-là, les médias ivoiriens annoncent en continu que la flotte aérienne du pays est anéantie, augmentant les tensions au sein de la population.
En réaction, de nombreuses manifestations éclatent à Abidjan, où les ressortissants français deviennent des cibles de la colère populaire.
Une intervention tendue à l’hôtel Ivoire
Les tensions ne font qu’augmenter dans les jours suivants. Au matin du 8 novembre, des chars français se dirigent vers l’hôtel Ivoire, officiellement pour sécuriser les ressortissants français qui s’y trouvent. Cependant, leur présence à proximité de la résidence présidentielle suscite suspicion et colère parmi les habitants du quartier, qui y voient une tentative de coup d’État déguisée. La tension monte encore d’un cran lorsque, le 9 novembre, des manifestants se rassemblent autour de l’hôtel Ivoire pour exprimer leur désaccord face à ce qu’ils perçoivent comme une ingérence étrangère.
Dans cette atmosphère tendue, des coups de feu éclatent. Les soldats français tirent et font de nombreux morts. 57 pour le bilan ivoirien et une vingtaine du côté de Paris.
Bilan et zones d’ombre persistantes
Dans cette atmosphère tendue, des coups de feu éclatent. Les soldats français tirent et font de nombreux morts. 57 pour le bilan ivoirien et une vingtaine du côté de Paris. Cet épisode dramatique a laissé de nombreuses questions sans réponse, et les enquêtes menées jusqu’ici n’ont pas permis de désigner des responsables. Comme l’attaque de Bouaké, les événements de l’hôtel Ivoire restent une énigme de cette crise ivoirienne qui jusqu’à là n’ont pas eu de réponses.
Un procès pour faire la lumière sur le bombardement de Bouaké en 2004
Le procès pour le bombardement de Bouaké en 2004 s’ouvre à Paris à partir du lundi 29 mars 2021, cherchant à clarifier les circonstances de cet événement, qui a engendré une crise entre la France et la Côte d’Ivoire. Jugés par contumace, le Biélorusse Yury Sushkin et deux officiers ivoiriens, Ange Magloire Gnanduillet Attualy et Patrice Ouei, sont accusés d’avoir orchestré l’attaque et risquent la réclusion à perpétuité.
Selon les rapports, l’incident avait conduit à l’arrestation de mercenaires, libérés peu après sur ordre français, avec pour priorité de protéger les ressortissants français en Côte d’Ivoire.
Les autorités françaises évoquent une erreur de l’armée ivoirienne, mais les familles des victimes et des partisans de Laurent Gbagbo soupçonnent une manipulation française destinée à déstabiliser son régime au profit d’Alassane Ouattara, arrivé au pouvoir en 2011 avec le soutien de Paris.
Aujourd’hui encore, 20 ans après, de nombreux Ivoiriens se souviennent de ces incidents en partageant des témoignages et en rappelant l’érection d’un monument des Martyrs à Abidjan, symbole de cette période difficile et pourtant largement oublié.