«La laïcité c’est un principe de paix»

Guillaume Trichard, actuel Grand Maître du Grand Orient de France.

Guillaume Trichard, l’actuel Grand Maître (GM) du Grand Orient de France (GODF), suit les traces de ses prédécesseurs. Après l’ex-GM Georges Sérignac, l’ex-GM adjoint Jacques Helary et notre compatriote Amaresh Ramlugan, GM adjoint actuel, il confirme la volonté de l’obédience à être sur le terrain de ses loges dans le monde et nous a ouvert les coulisses de son rôle de GM au Château Mon Désir, à Balaclava, le 29 mars.
Vous avez été initié à l’âge de 22 ans en 1999 et vous êtes devenu GM à 47 ans. Ne pensez-vous pas avec le recul que c’était tôt ?
Je dirais même que ce n’était pas assez tôt. C’est grâce à une émission de télévision, Des Racines et des Ailes, dans laquelle le GM de l’époque, Philippe Guglielmi, avait répondu à des questions de journalistes parce que le GODF avait ouvert ses portes, notamment d’une conférence publique à Colmar et puis l’ouverture de temples à Troyes. À un journaliste qui lui avait demandé s’il ne fallait pas être coopté, si la franc-maçonnerie n’était pas un peu sélective, élitiste, et si c’était très difficile d’y entrer, il avait répondu non. Quiconque souhaitait rejoindre le GODF pouvait adresser une lettre de candidature au siège. Le lendemain, j’ai candidaté. Et pourquoi je vous dis que cela aurait pu être plus tôt, c’est parce que j’en étais intimement convaincu depuis plusieurs années (cela faisait plusieurs années que je lisais, que je m’intéressais à la franc-maçonnerie). Si l’émission avait eu lieu avant, j’aurais certainement frappé à la porte du temple avant.
Qu’est-ce qui vous a mis sur la voie ?
L’idée même de poursuivre un chemin initiatique dès l’âge de 20 ans m’intéressait. L’émission, c’est le déclencheur de la candidature mais j’étais déjà quelqu’un d’assez spirituel. Je crois que pour s’engager sur un chemin initiatique et rejoindre un ordre initiatique, il faut quand même réaliser qu’il y a une part de spiritualité qui n’a rien à voir avec la religiosité. Lorsque l’on rejoint la franc-maçonnerie, on vient avec l’idée qu’on va travailler sur soi-même. On va tenter de s’améliorer, pas tout seul mais avec les autres. C’était déjà pour moi un processus intellectuel que j’avais engagé depuis plusieurs années. Donc, effectivement, en lisant et en m’intéressant, l’aspect du travail avec une méthode maçonnique qui repose sur la grammaire que sont les symboles m’intéressait énormément. C’est important de rappeler qu’on est avant tout un ordre initiatique parce que c’est ce qui nous différencie des laboratoires d’idées, des think tanks, des clubs politistes. Après, il y avait cette belle idée d’avoir déjà, en 1989, voulu extérioriser les portes du GODF.
Comment avez-vous vécu le fait de faire deux cheminements en même temps alors que vous faites des études et que vous commencez une vie d’adulte ?
J’ai poursuivi deux études en parallèle. J’ai suivi à la fois mon cursus à l’Institut Mines Telecom et je faisais une maîtrise en sciences de gestion à l’université. Je pense que je suis boulimique de travail, et justement, pour moi la franc-maçonne- rie a été une respiration. C’était vraiment une bulle qui me permettait de faire une pause dans ma vie profane et de réfléchir au sens de ma vie, de ma vie au milieu de celle des autres. On a les candidatures spontanées qui, en France, sont en croissance exponentielle ; 80 % sont des jeunes entre 20 et 30 ans. Quand je vois la qualité de ces candidatures, de ces jeunes, les lettres de motivation qu’ils nous écrivent, la réflexion que certains d’entre eux portent, honnêtement, il y a de quoi être optimiste pour la franc-maçonnerie.
Est-il important pour un jeune maçon de passer par les trois premiers grades ?
Le GODF est une fédération de rites et nous avons 400 loges qui travaillent à des rites très différents, le rite de référence étant le Rite français. Le point commun entre tous ces rites, c’est qu’il y a bien plusieurs étapes, d’apprenti, de compagnon, ensuite on devient maître. C’est le socle de notre franc-maçonnerie. Pour moi, c’est essentiel l’apprentissage parce que qui dit chemin initiatique dit étape. D’ailleurs, l’initiation, j’ai toujours considéré qu’elle commence dès notre naissance parce que, finalement, la vie est un chemin initiatique. Là, des hommes et des femmes décident d’aller un peu plus dans le détail, d’aller travailler sur eux-mêmes, d’emprunter un autre chemin avec des frères et des sœurs, mais encore une fois, ce qui est important, c’est de comprendre que ça ne peut être que progressif. On n’est pas initié en quelques heures et, ensuite, on est un franc-maçon accompli. D’ailleurs, on a une expression : «peu importe son degré, on est des éternels apprentis».
Votre parcours syndical découle-t-il en partie du fait que vous êtes franc-maçon ?
Ce qu’on dit, c’est que quand on rejoint la franc-maçonnerie, en particulier au GODF, on prend l’engagement de travailler à la fois à l’amélioration de l’homme, à contribuer à l’édification d’un temple de l’humanité meilleur, c’est-à-dire d’œuvrer en dehors du temps. Il y a plusieurs façons de le faire. Vous avez des frères et des sœurs qui s’investissent dans la vie publique, locale, nationale, dans des associations, des ONG, dans leur conseil de quartier et il y a ceux qui s’investissent sur leur lieu de travail, qui deviennent des représentants du personnel, des syndicalistes. À un moment donné, j’ai effectivement considéré que l’entreprise ne pouvait pas être un lieu où l’es- pace d’une journée de travail, on abandonne ses convictions, ses valeurs et ses principes. Si on y réfléchit bien, vous quittez le temple maçonnique, vous vous retrouvez dans le monde profane, dans la rue, chez vous, et vous allez travailler.
Donc, j’ai considéré qu’il était important pour moi de défendre mes collègues. C’est comme ça que cela a commencé. J’ai été un représentant du personnel de terrain, délégué du personnel, secrétaire de comité d’entreprise, etc. Je me suis présenté aux élections; j’ai créé un syndicat auto- nome, et petit à petit, je me suis investi un peu plus. Jusqu’à devenir en 2013 le secrétaire général de la Fédération de l’industrie au niveau fédéral (du secteur d’activité) et national, et pour six ans après rejoindre l’équipe nationale interprofessionnelle. Pour moi, c’était quelque chose de naturel et quand on regarde finalement l’histoire de la franc-maçonnerie, les francs-maçons sont nombreux à s’être investis dans les sphères politiques, syndicales et associatives. Simplement, tous ne se dévoilaient pas et tous ne mettaient pas en avant le fait qu’ils étaient francs-maçons. D’ailleurs, pendant très longtemps, jusqu’à m’investir au sein de l’obédience, je n’étais pas un franc-maçon qui s’extériorisait et qui mettait en avant son appartenance maçonnique. Donc, l’engagement dans la cité, c’est le prolongement du travail que l’on effectue dans le temple.
Comment se passe le mandat du GM, c’est un an. Est-ce suffisant pour apporter des changements ?
C’est très important l’histoire de l’année de mandat. Au GODF, depuis 1773, chaque année, tous ceux qui sont élus vénérables maîtres, présidents de congrès régionaux, tous remettent leur mandat en jeu. Ça vaut pour le GM qui est élu pour une année sur son mandat de conseiller de l’Ordre, qui est de trois ans. Donc, quand bien même un frère ou une sœur serait élu GM lors de sa première année de conseiller de l’Ordre, au terme de l’année, au moment du Convent, il devrait remettre à nouveau sa candidature et se soumettre au suffrage universel de ses pairs. C’est un système démocratique qui est très précieux, célébré l’année dernière avec le 250e anniversaire de l’appellation GODF. Cela ne fonctionne pas comme ça dans toutes les obédiences. On est vraiment une organisation très démocratique avec une horizontalité importante et très peu de verticalité. Ceux qui décident au GODF sont les loges qui chaque année, dans le cadre du Convent, définissent les orientations pour l’exécutif qui doit les suivre.
Comment le GODF et les francs-maçons s’investissent-ils dans la cité ?
Je ne considère pas que c’est le GODF qui agit dans la cité, ici à Maurice ou ailleurs. Ce sont les francs-maçons. Le GODF est une obédience maçonnique ; la franc-maçonnerie est une méthode, un ordre initiatique. Ce sont les frères et les sœurs qui agissent. Il y a une sorte de gradation dans l’action. Certains s’investissent temporaire- ment, sporadiquement dans les associations, mais ils font «leur part». Ils prennent leur part à l’amélioration de la société. Le GM du GODF lui, son rôle, c’est de représenter et d’incarner l’obédience. En termes de temporalité, c’est de minuit à mi- nuit; il n’y a pas de pause. On est GM y compris la nuit parce que de toute façon le GODF est une obédience internationale qui a des loges qui sont en activité tout le tour du cadran de la montre, donc, avec différents fuseaux horaires. Du coup, c’est à moi de m’organiser et d’assumer en parallèle mon travail. Aujourd’hui, je coordonne toujours le secteur juridique de mon syndicat parce que ce n’est pas un métier d’être GM; c’est un mandat, une activité bénévole et, à un moment, il faut donc pouvoir vivre par ailleurs.
Concrètement, quels sont vos grands projets en tant que GM?
Tout d’abord, j’ai défini quelques axes au moment de mon discours de prestation de serment. J’ai fait le constat qu’il y a effectivement un certain nombre de défis qui sont face aux citoyens, à nos frères et sœurs. Vous avez le défi technologique avec la montée en puissance de l’intelligence artificielle, des nanotechnologies, etc., le défi de la montée des intégrismes religieux qui se généralisent dans beaucoup de continents. Il y a également la montée en puissance des régimes dits illibéraux ; plus de la moitié de l’Humanité vit dans des pays qui sont soit des dictatures, soit des démocratures. Face à cela, que pensent les francs-maçons ? J’ai posé la question au Convent et on a décidé de mettre en place plusieurs projets. Encore une fois, les francs-maçons réfléchissent avant tout, pensent. C’est important de le dire : on est un ordre initiatique et on n’a pas d’autre vertu que de faire des propositions, d’alimenter le débat public. On n’est pas là pour prendre position, ou se substituer à des organisations publiques, syndicales ou associatives. Au sein de nos loges, on a une pluralité d’opinions qui fait d’ailleurs la force du GODF.
On a décidé de travailler sur le sujet des dignités humaines. On a balayé tout un tas de sujets comme la précarité étudiante, le défi de l’eau (l’eau qui au-delà d’être un symbole fort pour les francs-maçons est un sujet de dignité humaine). On a étudié la question des travailleurs pauvres, la question de l’accueil des migrants, et d’ailleurs, un autre grand projet qui va aboutir au mois de mai, c’est le symposium international sur l’immigration. C’est un sujet qui a donné lieu à trop de postures et je dirai même, à trop d’imposture politique. Quelque part, le rôle des francs-maçons, c’est de montrer que sur des sujets aussi importants, il y a la nécessité d’une approche plus complexe. La franc-maçonnerie, c’est une pédagogie du doute, du questionnement. On a mis en place ce symposium international avec des obédiences africaines, méditerranéennes et européennes. L’idée est que ça puisse avoir lieu chaque année et en s’intéressant aux différentes zones du monde.
Nous menons également une réflexion, avec des obédiences amies européennes, sur la question de la liberté individuelle et de l’État de droit en Europe, dans une année très spécifique où l’Europe va être appelée à procéder à des élections pour le Parlement européen. Il y a quelques jours, nous avons animé à peu près le même type de débat sur l’Amérique latine et les Caraïbes, qui a donné lieu à une après-midi de conférences et de tables rondes en visioconférence, avec 300 participants. On a vu la puissance du croisement entre une volonté, celle d’obédiences maçonniques, et des technologies, permettant au-delà des frontières et des fuseaux horaires de pouvoir travailler ensemble sur des sujets très importants pour l’Humanité. Ce sont des projets concrets qui donnent lieu à des actes, des rapports, qui sont ensuite diffusés, diffusables.
Chaque année, au GODF, on a les questions et l’étude des loges. Il y a une liste de questions sur lesquelles les loges doivent travailler. Elles doivent en choisir deux, ensuite une synthèse est faite au nouveau régional dans le monde entier. Ensuite une synthèse est faite au niveau national qui donne lieu à des actes, à un livre. Le symposium scientifique sur l’immigration va même donner lieu à un appel qui sera lancé par les GM des obédiences maçonniques. Ce sont des illustrations très concrètes de ce que j’appelle réparer et défendre non pas uniquement la République française mais de l’édification d’une République universelle, pas au sens d’un système politique, mais au sens de ses principes de liberté, d’égalité et de fraternité qu’on veut pouvoir voir apparaître dans tous les pays du monde.
Quel est l’objectif de vos voyages, dont celui à Maurice ?
Maurice est une étape importante dans des déplacements que j’effectue dans beaucoup de régions du monde. À l’inverse de certains de mes prédécesseurs peut-être, je me suis beaucoup déplacé. J’ai fait plusieurs tournées africaines et je suis du coup le premier GM à avoir fait autant de pays d’Afrique en peu de temps parce que je considère qu’il y a une situation en Afrique, dans les Afriques, les sous-régions, les différents pays avec différentes problématiques. Dans ces situations-là, la franc-maçonnerie libérale et adogmatique a vraiment un rôle à jouer. Je suis également allé en Asie et dans les Caraïbes, et je viens dans l’océan Indien parce que le GODF ne se limite pas aux frontières hexagonales. Il est normal que je vienne dans une partie du monde où nous avons beaucoup de loges. Entre les 22 loges que nous avons à La Réunion, et la dizaine de loges que nous avons à Maurice, c’est un chiffre très important quand on le ramène à l’effectif du nombre de loges que nous avons dans la région Monde. Je vais aussi à Rodrigues où nous avons une loge et où nos frères et sœurs n’ont pas vu de GM depuis 20 ans. Je vais ensuite à Madagascar qui est aussi dans une situation politique très complexe.
C’est mon rôle d’aller à la rencontre des frères et des sœurs pour leur apporter le sou- tien de l’obédience et pour montrer que chaque loge a de l’importance. Il n’y a pas plus d’importance donnée à des loges parisiennes, lyonnaises ou marseillaises qu’à des loges mauriciennes. C’est aussi très inspirant pour moi et très instructif. J’apprends et je regarde ce qui se passe. On m’interpelle sur les questions multiples de pluralité. Ce sont des réflexions très importantes pour un GM qui a la charge de rappeler partout que le GODF est un défenseur de la liberté absolue de conscience, de la laïcité. Et donc, qu’est-ce que cela signifie la laïcité dans une île comme Maurice ? Le GM se déplace aussi pour donner des conférences publiques à destination des profanes, pour nourrir un dialogue avec les non-initiés qui s’intéressent à la franc-maçonnerie et qui ont des questions. J’ai donné plein de cartes de visite à des profanes à la fin de la conférence publique à la municipalité de Port-Louis. Il rencontre aussi des institutionnels et des décideurs politiques pour avoir des échanges, comme cela a été le cas avec monsieur le maire de Port-Louis, et rencontrer les médias.
Dans ces cas-là, je pense que je reçois plus que je ne donne. C’est important pour un GM d’être au plus proche du terrain, de ne pas se contenter de connaissances livresques récupérées sur les réseaux sociaux. Par exemple, j’ai été très impressionné par toute l’histoire de l’engagisme et des engagés. C’est une histoire qui est méconnue en général en France et qui m’a fortement intéressé. D’ailleurs, le lieu qui est classé au patrimoine mondial de l’Unesco est très bien fait et il y a en plus le sens de la transmission de l’histoire. C’est très important pour les francs-maçons de s’attacher à ces questions mémorielles.
L’histoire des loges de Maurice et d’ailleurs a évolué avec les stigmates tels que l’engagisme, l’esclavagisme, etc.
Évidemment que j’en suis conscient et je le dis très souvent, les francs-maçons ne sont pas des adeptes de la cancel culture. Donc, il faut regarder son histoire en face. Ça vaut pour toute l’Humanité. Si on veut que l’histoire ne se répète pas, il faut pouvoir regarder son histoire en face, l’affronter, l’assumer. Toute l’histoire, y compris les mauvaises heures et ceux qui avaient une interprétation particulière de leur serment maçonnique, mais également les nombreux courageux qui ont su dire non, qui ont su justement s’investir pour mettre fin à ces situations de barbarie. Vous parlez de l’esclavagisme qui est la chosification de l’être humain par d’autres êtres humains en vue de les vendre comme des marchandises. C’est une barbarie. Il y a des francs-maçons qui se sont rebellés, qui se sont investis comme Victor Schœlcher qui, pour la France et le monde, est une figure de l’abolitionnisme de l’esclavage. On peut parler d’Auguste François Perrinon. 80 % de la commission parlementaire sur l’abolition de l’esclavage étaient composés de francs-maçons. Perinnon, dont la tombe est à Saint-Martin, était un député abolitionniste. Je peux vous parler de Pierre Savorgnan de Brazza qui était un franc-maçon du GODF qui a construit Brazzaville et qui l’a fait sans verser une seule goutte de sang mais dans le cadre d’une négociation avec le roi. Il a démissionné du GODF parce qu’à l’époque, il dénonçait le silence de l’obédience par rapport à la gestion de l’Afrique-Équatoriale française.
Il faut vraiment regarder son histoire en face et ensuite, il faut agir au quotidien, dans le présent, parce que l’esclavagisme, ce n’est pas du passé. Quand vous allez au Mémorial ACTe en Guadeloupe, à la fin, vous voyez les millions d’êtres humains actuellement qui sont dans des situations d’esclavage. On parle par exemple de l’esclavage sexuel chez les mineurs, de ces enfants qui travaillent dans les mines pour recueillir des minerais pour nos smartphones. Tout ça aussi doit nous interpeller. Donc, nous, on regarde les choses en face. Il y a d’ailleurs un gros travail qui a été fait sur cet aspect mémoriel par le conseil de l’ordre du GODF. Par exemple, cette année, j’ai décidé d’un grand voyage mémoriel à Auschwitz. Nous allons avec plus 300 frères et sœurs du GODF et d’obédiences amies le week-end du 7 et 8 avril à Auschwitz.
Quel est votre regard sur les dé- fis socio-économiques et géopolitiques nationaux et mondiaux, les guerres et conflits, etc. du moment ?
Force est de constater que le pogrom du 7 octobre est le pogrom le plus violent et le plus important depuis le génocide de la Shoah. Ça fait partie de notre rôle actif d’interpeller nos contemporains sur tous types de risques comme l’esclavagisme moderne, le retour de la montée de l’antisémitisme, de la montée du péril brun, de l’extrême droite et toute l’idéologie de racisme et de xénophobie qu’elle porte. Ça, c’est notre mission. Je le dis souvent, nous sommes un peu les sentinelles de la République universelle. Ce qui se passe au Proche-Orient nous terrifie et nous horrifie. Pour nous, la seule voie possible, c’est celle du multilatéralisme et de la négociation diplomatique. Il est urgent que les armes se taisent. Dans le communiqué de presse qu’on a fait le 20 novembre dernier, dont le titre est «Cessez le feu», on a dit qu’il faudrait désormais que les armes se taisent pour laisser la place aux négociations diplomatiques parce que ce qui se passe là-bas est une tragédie humaine. Léon Bourgeois, qui était un grand franc-maçon, a conceptualisé le multilatéralisme qui a donné naissance à la Société des nations et il a eu le Prix Nobel de la paix en 1920 grâce à ça. Son héritage pour nous est vivant. Aujourd’hui, ce qui est accablant, c’est de voir la paralysie face à la situation. Heureusement, les États-Unis se sont abstenus sur la résolution de l’ONU appelant un cessez-le-feu et elle a été votée. Mais combien de mois après ? Ce qui compte ce sont les actes.
Il y a aussi le Yémen, l’Ukraine et beaucoup de théâtres de conflits armés. Malheureusement, il faut aussi le dire, 80 % des conflits armés sont ceux dans lesquels on retrouve l’intégrisme religieux de part et d’autre. On est très inquiets des bouleversements des rapports de force dans le monde avec l’émergence des BRICS, qui n’est pas une difficulté en tant que tel. Il n’y a pas de problème que des nations fassent des alliances les uns avec les autres mais vous y trouvez la Fédération de Russie, la République populaire de Chine. À une époque, il y avait le Brésil qui n’était pas celui de Lula mais de Bolsonaro. Il est inquiétant qu’il puisse y avoir des alliances de pays qui sont des dictatures et qui commencent une influence très importante dans le multilatéralisme. Au Proche-Orient, ce n’est pas l’ONU qui est au centre des négociations multilatérales.
Quand je dis que les francs-maçons du GODF sont les défenseurs de la République universelle qui est fondée sur la laïcité, c’est-à-dire la liberté absolue de conscience. La laïcité, c’est un principe de paix. Vous êtes libre de croire et de ne pas croire et de pratiquer votre culte ou pas si vous n’en avez pas dans le respect des uns et des autres. Je pense que c’est ce qui se passe de façon assez magnifique à Maurice, de ce que j’ai compris. On est très vigilants sur la montée des intégrismes. On est aussi des adversaires du communautarisme qui minent les sociétés. Ce n’est pas le vivre-ensemble ; c’est l’être-ensemble. C’est-à-dire avec les êtres humains qui transcendent leur appartenance culturelle, ethnique et sociologique. Ils apportent la richesse de leur culture, mais dans un esprit de concorde pour faire l’Humanité.

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